Dans le but d’améliorer la connaissance non seulement de ses membres, mais aussi des Européens, le Mouvement européen Paris propose une analyse des principaux indicateurs de l’Union européenne et des Etats membres qui la composent.
L’Europe en chiffres s’est donné pour objectif de rechercher de l’information extraite des canaux officiels et reconnus et de la présenter de façon synthétique et moins sévère que des tableaux ou des bases de données comme celles d’Eurostat, de l’OCDE ou de l’INED.
Dans ce document, nous nous sommes penchés sur l’endettement et le déficit publics. En avril et en octobre, Eurostat émet un communiqué de presse dans lequel pour la zone Euro, l’Union européenne des 27 et pour chaque pays qui la compose les indicateurs suivants :
- Le Produit intérieur brut (en millions d’euros)
- Le déficit public (en millions d’euros et en pourcentage du PIB)
- Les dépenses et recettes publiques en pourcentage du PIB
- La dette publique (en millions d’euros et en pourcentage du PIB)
Dans sa dernière publication en date du 21 octobre 2021[1] on peut constater que, confrontée aux conséquences économiques de la crise sanitaire, la situation s’est dégradée en 2020 par rapport à 2019 sur tous les indicateurs et pour tous les pays.
Ainsi, le PIB a perdu près de 600 milliards d’euros, le déficit public a augmenté de presque 850 milliards d’euros et l’endettement de 1 250 milliards d’euros pour l’Union européenne !
Pour la zone euro, ces mêmes écarts sont aussi significatifs, puisque le PIB a chuté de 580 milliards, le déficit a augmenté de 750 milliards et l’endettement de près de 1100 milliards.
Ces chiffres représentent des sommes considérables dont il est difficile d’imaginer ce qu’ils signifient concrètement. C’est pourquoi, est-il souvent préférable d’évoquer la valeur de ces indicateurs en pourcentages ou en euros par habitant plutôt qu’en millions ou en milliards d’euros.
Les dépenses publiques
Le déficit public correspond à l’écart entre les dépenses et les recettes publiques. Si on regarde les dépenses par habitant, on relève une grande disparité entre le Luxembourg (47,4 K€ par habitant) et la Bulgarie (3,7 K€ par habitant) chacun hors norme dans sa catégorie. Les dépenses publiques les plus élevées concernent les pays dont les systèmes sociaux sont les plus « avancés » et souvent les plus riches.
Ainsi les pays scandinaves auxquels on peut ajouter l’Autriche dépensent de l’ordre de 25 K€ par habitant.
Viennent ensuite les grands pays, ayant le PIB le plus élevé comme l’Allemagne, la France et les Pays-Bas avec des dépense de 20 000 € suivis par l’Italie et l’Espagne qui dépensent respectivement 16 K€ et 12,5 K€.
Sources : Eurostat 119/2021 – 21 octobre 2021
Notons qu’en Pourcentage du PIB, la France se distingue en consacrant 62 % de son PIB en dépenses publiques ce qui représente le ratio le plus élevé de l’Union, soit 10 points de plus que l’Allemagne ! Cet écart est structurel et se constate depuis plus d’une décennie.
Le déficit
En 2020, Tous les pays européens, confrontés à la pandémie de la COVID 19, ont dépensé plus qu’ils n’ont encaissé en recettes publiques. Ce qui n’était pas le cas en 2019 quand 10 pays seulement étaient déficitaires et 17 bénéficiaires !
Sources : Eurostat 119/2021 – 21 octobre 2021
Les pays qui ont enregistré un faible déficit en 2020 sont le Danemark (- 0,2 %) , la Suède (- 2,8 %), La Bulgarie (- 4 %), Le Luxembourg (- 3,5 %) et l’Allemagne (- 4,3 %).
Les pays ayant enregistrés un déficit supérieur à (- 9 %) sont l’Espagne (- 11 %), la Grèce (- 10,1 %), l’Italie (- 9,6 %), la Roumanie (- 9,4 %), la Belgique et la France (- 9,1 %).
L’endettement public
Le taux d’endettement de l’Union Européenne est de 90,1 % de son PIB. 20 Etats-membres sont en dessous de cette moyenne et 7 sont au-dessus.
Pour la zone euro, ce taux est de 97,3 % avec 11 Etats se situant au-dessus : la Grèce (206,3 %), l’Italie (155,6 %), le Portugal (135,2 %), l’Espagne ( 120 %) et la France (115 %) ; 7 Etats sont en dessous.
Sources : Eurostat 119/2021 – 21 octobre 2021
Si les 5 Etats les plus endettés appartiennent à la Zone Euros, parmi les moins endettés seuls le Luxembourg avec 24,8 % et l’Estonie (19 %) sont membres de la zone euro. Les autres sont le Danemark (42,1 %), la Suède (39,7 %), la République Tchèque ( 37,7 %) et la Bulgarie (24,7 %).
Les Grands Pays
Si on s’intéresse aux 5 pays économiquement les plus importants (représentant 70 % du PIB de l’Union et 80 % du PIB de la zone euro), on constate des comportements différents :
Les 3 Pays du Sud : Italie, Espagne et France sont endettés au-delà de 100 % du PIB et déficitaires de plus de 9 % ;
Les 2 pays du Nord, que l’on peut aussi qualifier de frugaux, comme l’Allemagne et les Pays-Bas, dont l’endettement et le déficit public se sont aussi dégradés en 2020 par rapport à 2019 sans qu’ils se soient éloignés des critères de Maastricht de 60 % pour l’endettement et – 3 % pour le déficit.
Sources : Eurostat 119/2021 – 21 octobre 2021
Si on s’intéresse maintenant à l’évolution de l’endettement pour ces mêmes pays depuis 2000 (rappelons au passage que l’introduction de l’euro date du 1er janvier 2002), mise à part l’Italie dont l’endettement était déjà élevé, celui des autres pays était inférieur à 60 % du PIB.
Tous les pays ont enregistré une dégradation de leur endettement en 2008 / 2009. Ainsi si on compare 2010 à 2005, on relève une augmentation de 9,4 points pour les Pays-Bas ; de 12,6 pour l’Italie ; de 14,5 pour l’Allemagne ; de 17,9 pour la France et de 18,1 pour l’Espagne.
Sources : Eurostat gov_10dd_edpt1
A partir de 2010, on observe que les Pays-Bas et surtout l’Allemagne mènent une politique volontariste pour maîtriser leur endettement public qui varient respectivement de + 5,4 points et de – 10 points entre 2015 et 2010.
De leur côté, l’Italie et l’Espagne voient leur endettement poursuivre leur dégradation avec + 16,1 et + 38,8 points, la France se trouvant dans une situation intermédiaire avec + 10,3.
Conclusion
L’objet de cette présentation est de sensibiliser les citoyens de l’Union européenne sur les grands thèmes qui peuvent alimenter une réflexion sur l’actualité et l’avenir du continent en s’appuyant sur des chiffres.
Si les règles de discipline budgétaire concernant la dette et le déficit publics, que la France n’a jamais réellement respectées, ont été suspendues le 20 mars 2020 par la Commission, il n’en demeure pas moins que des objectifs de convergence devront être renégociés en 2022. Le nouvel accord de gouvernement allemand[2] et la nomination de Christian Lindner[3] en charge de l’économie et des finances, indiquent que ces négociations seront difficiles.
Le sujet de la soutenabilité de la dette et de la maîtrise du déficit n’est pas un sujet très populaire et reste discret dans la campagne électorale, mais il sera très présent au cours de la prochaine décennie.
Jean-Claude Houdoin
Ancien Président du Mouvement européen – Paris
Novembre 2021
[1] https://ec.europa.eu/eurostat/documents/2995521/11563331/2-21102021-AP-FR.pdf/024c5b21-3bf8-9b6f-a679-3f1ba0f10cff
[2] Le Grand Continent « Doctrine de la nouvelle ère allemande » – 26 septembre : « Nous voulons renforcer et approfondir l’Union économique et monétaire. Le pacte de stabilité et de croissance (PSC) a prouvé sa flexibilité. Sur sa base, nous voulons garantir la croissance, maintenir la viabilité de la dette…. »
[3] Le Figaro du 24 novembre 2021 « Allemagne, Christian Lindner, un faucon fiscal aux Finances »