La reprise économique après les années COVID a été brutale, trop sans doute.
Elle était prévisible et aurait dû être mieux maîtrisée et accompagnée.
Après avoir créé de la monnaie, les banques centrales ont acheté une masse d’obligations d’État très rapidement à des taux d’intérêt très bas.
Cet argent a alimenté les États en liquidités qu’ils ont distribuées sous forme de salaires ou d’aides multiples aux populations touchées par la pandémie.
Sans possibilité de consommer ou de dépenser, les ménages et les entreprises en cessation forcée d’activité ont accumulé une épargne importante.
Une fois le risque sanitaire éloigné, au lieu de maintenir une certaine prudence, les agents économiques ont souhaité dépenser massivement, accélérant la demande (immobilier, loisirs, consommation courante, automobile …)
L’offre n’a pas suivi. Tous les jours des difficultés à recruter du personnel dans de nombreux secteurs des biens et services apparaissent.
Une inflation de type classique quand la demande dépasse l’offre s’est installée.
Elle ne se réduira pas par un coup de baguette magique, sauf si la consommation se calme et qu’avec la hausse des taux d’intérêt les agents économiques acceptent de reconstituer une partie de leur épargne, mieux rémunérée, au lieu de la dépenser frénétiquement.
Contrairement à ce que professent les syndicats, le pouvoir d’achat ne s’était pas dégradé, au contraire.
Viennent s’ajouter, hélas, deux circonstances exceptionnelles : la guerre en Ukraine et ses effets sur les prix de l’énergie, du blé et des engrais agricoles en particulier ainsi que le reconfinement en Chine qui pèse sur la demande chinoise, sur sa production de biens et de services, entrainant des goulots d’étranglement.
Enfin le réflexe sain du recours à la relocalisation de certaines productions pour réduire notre dépendance vis-à-vis de l’Asie en particulier, orchestré par l’Union Européenne, ne va pas dans le sens de la réduction initiale des coûts et donc des prix.
Reconnaissant l’impossibilité de maintenir les taux d’intérêts au niveau de la croissance potentielle, les banques centrales ont remonté leurs taux de refinancement pour refroidir les économies en surchauffe.
Comme l’ont démontré les économistes les politiques économiques qu’elles soient budgétaire et monétaire ne sont que des solutions ponctuelles, comme les « boucliers » divers et variés.
Il n’y a rien de tel que la concurrence sur les marchés des biens, du travail et des capitaux pour lutter, sur la durée, contre les méfaits de l’inflation. La politique budgétaire et fiscale de Liz Truss au Royaume Uni, grand adepte du libéralisme pourtant, a été retoquée par les marchés, remparts des peuples en dernier ressort, et a entraîné la chute de son gouvernement. L’Italie avec ses populistes au pouvoir semble mieux inspirée pour comprendre la situation.
Le meilleur exemple aujourd’hui de cette évidence est l’évolution du prix du gaz qui baisse à vue d’œil parce que la consommation est en recul et que les perspectives de récession freine la production industrielle.
Une hausse incontrôlée des salaires en période de plein emploi entrainerait la résurgence de l’enchaînement fatal-prix-salaires-perte de compétitivité-baisse des investissements productifs-récession-faillites-chômage.
Ce triste engrenage pourrait être amplifié par les marchés si la dette des États, oubliant l’orthodoxie financière, reprenait sa course vers les sommets, si son poids relatif sur les comptes publics, en période de hausse des taux de surcroît, augmentait et si l’Euro venait à baisser significativement par rapport aux autres devises comme l’a fait la livre, ajoutant de l’inflation à l’inflation.
Eric Dumont
Président du Mouvement Européen Paris