À la recherche d’une patrie européenne : cent ans de représentation de l’Europe dans la revue Europe (Passau, Allemagne)
Université de Passau (Allemagne), 10 et 11 novembre 2023
Organisation :
Marina Ortrud Hertrampf (Université de Passau) & Guillaume Bridet (Sorbonne Nouvelle)
« Les années qui vont venir décideront du sort de l’Europe, auquel est lié celui de toute race humaine. Il est urgent que nous apprenions à regarder plus haut que tous les intérêts, les passions, les égoïsmes des individus et des groupements ethniques » : même si son eurocentrisme le situe dans un certain contexte qui n’est plus le nôtre et qui demande à être interrogé, ce constat d’un nécessaire dépassement des intérêts des peuples et des nations sonne quant à lui comme très actuel. René Acros le formule dans le premier numéro de la revue Europe en février 1923. Cent ans après la naissance de cette revue littéraire et intellectuelle qui s’efforce de passer d’une vision de l’Europe à une réalité vécue, nous nous retrouvons au cœur de l’Europe – certes constitutionnalisée politiquement entre-temps par l’Union européenne – confrontés à une situation comparable : sur un seuil où se joue l’avenir de la « Patrie européenne ».
Dans le contexte d’une actualité pressante et tragique rappelant les profondes motivations qui poussèrent à fonder une Europe politique, ce colloque aimerait faire entendre des voix fortes venues du passé et qui portèrent cette idée d’Europe. Romain Rolland, patron intellectuel et cofondateur d’Europe, sera au centre de l’attention, aux côtés d’autres acteurs au sein de la revue Europe mais aussi en Europe et au-delà, comme Jean-Richard Bloch, Georges Duhamel, Louis Aragon, Elsa Triolet, Tristan Tzara, Charles Vildrac, Paul Éluard, Max Jacob, Maxime Gorki, Knut Hamsun, Panaït Istrati, Virginia Woolf ou Rabindranath Tagore, pour n’en citer que quelques-uns.
Les noms mentionnés ici illustrent déjà la particularité de l’approche européenne du groupe fondateur autour de Romain Rolland : l’Europe est pensée de manière inclusive et accueillante ; elle n’incarne pas un Occident supérieur dans un sens colonialiste et hégémonique. L’Europe – tout comme la revue du même nom – est considérée comme une interface où, à travers la littérature, les arts, la vie intellectuelle et politique, les peuples et les cultures les plus divers se rencontrent, entrent en dialogue, s’entraident et entretiennent des échanges enrichissants. L’un des objectifs d’Europe est donc de dépasser les frontières et d’explorer les possibilités (et les limites) des voies transculturelles susceptibles de favoriser une coexistence pacifique, voire une unification des États et des peuples.